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Le jeûne intermittent est-il vraiment risqué ?


Barbara Philipps - 26/03/2024 - 0 comments

L’AVIS DE NOTRE DÉPARTEMENT DE RECHERCHE

Le jeûne intermittent augmenterait-il le risque de mourir d’une maladie cardiovasculaire ?

Selon les données d’une présentation de posters, exposés à l’occasion d’une conférence scientifique de l’American Heart Association, le jeûne intermittent (ou jeûne par intervalles) est associé à un risque accru de mourir d’une maladie cardiovasculaire (Source). Reprise par de grands portails d’information internationaux, dont le Washington Post, NBC et Skynews, cette information devint très vite virale.

Cela dit, les raisons de considérer cette « sensation » de l’heure avec une certaine prudence sont légion. D’emblée, rappelons que cette analyse n’a pas encore été soumise à la procédure d’évaluation par les pairs (c’est-à-dire qu’elle n’a toujours pas été examinée par des experts indépendants de la même discipline) et n’a pas, non plus, été publiée dans une quelconque revue scientifique, mais seulement présentée sous la forme d’un poster dans le cadre d’une conférence, où la validité des résultats n’a pas pu être vérifiée. De surcroît, les données proviennent d’une grande étude épidémiologique d’observation, un format qui ne permet pas, normalement, de conclure à l’existence d’un degré de causalité corroboré par la recherche.

Au demeurant, ce n’est pas la première fois que les données de cette cohorte font l’objet de critiques. La validité des études menées aux États-Unis suggérant que sauter le petit-déjeuner augmente le risque de maladies cardiovasculaires a déjà nourri de vives controverses. Des études épidémiologiques similaires, dont certaines ont exploité la même base de données que l’étude en question, présentent de nombreux biais, comme le relève Peter Attia. Il s’avère, entre autres, difficile de séparer le bon grain de l’ivraie, les définitions de « sauter le petit-déjeuner » ayant souvent tendance à diverger au gré des champs sémantiques ou lexicaux. Aux États-Unis, les adultes qui sautent plus souvent le petit-déjeuner sont généralement moins soucieux de leur santé que ceux qui le font moins souvent. Partant de là, il est possible que ce ne soit pas le fait de sauter le petit-déjeuner en soi qui soit responsable de l’impact sur les maladies chroniques, mais plutôt celui de manger la nuit ou toute autre habitude néfaste pour la santé.

Entretemps, la validité des résultats fut remise en doute par des scientifiques de tous horizons. Comme le souligne Pam R. Taub, cardiologue et professeure de médecine à l’Université de Californie, à San Diego, 31 événements cardiovasculaires sont survenus chez 414 sujets de la cohorte, lesquels se sont abstenus de manger pendant huit heures ou plus, sur une période d’observation de huit ans en moyenne. Ce sous-groupe ne représentait toutefois que 2 % de l’ensemble de la cohorte (414 personnes sur 20 078). À noter également un pourcentage de fumeurs et fumeuses plus élevé dans ce groupe (60 %) (23,2 % contre 6,6 % dans le groupe de contrôle).

En revanche, nombreuses sont les études qui montrent que le jeûne peut normaliser les facteurs de risque de maladies cardiovasculaires. Cela vaut aussi bien pour le jeûne intermittent que pour le jeûne longue durée, à l’instar de ce que nous avons réussi à démontrer dans nos propres études. Par conséquent, tout porte à croire que ce n’est pas le jeûne intermittent en soi qui serait lié à un risque plus élevé d’événements cardiovasculaires mortels.

De manière générale, il n’existe, à ce jour, aucune preuve concluante d’un créneau horaire spécifique optimal pour les repas. Les membres de l’étude en question n’ont pas, non plus, examiné cette question en détail. Une prise alimentaire limitée dans le temps peut signifier que l’on saute soit le petit-déjeuner soit le dîner. En comparant ces deux formes de jeûne intermittent, il semble que le fait de sauter le dîner ou de le prendre plus tôt soit associé à davantage de bénéfices pour la santé que le fait de sauter le petit-déjeuner. En savoir plus !

Le créneau horaire idéal pour la prise de nourriture

Le créneau horaire idéal pour la prise de nourriture est essentiellement lié à notre biologie : les nuits sont des phases de repos et de jeûne qui permettent aux cellules et aux tissus de se régénérer et de rajeunir. La durée de la pause-repas est à déterminer en fonction de plusieurs paramètres, dont l’âge, le poids et l’état de santé. Les problèmes cardiovasculaires ne sont nullement influencés par les intervalles de jeûne, mais bien par l’alimentation, l’activité physique et d’autres facteurs.